La Compagnie Affable

Textes & Scènes de Théâtre / Dialogues de Cinéma / Séries / Littérature / Philo / Poésie…

Persona d’Ingmar Bergman : le « monologue » d’Alma (Bibi Andersson)

Persona Ingmar Bergman film Bibi Andersson Alma

Bibi Andersson (Alma) dans Persona d’Ingmar Bergman (1966).

Long monologue* pour femme tiré du film Persona d’Ingmar Bergman. L’infirmière Alma (Bibi Andersson) raconte à sa patiente Elizabeth (Liv Ullmann) un épisode très érotique et très heureux de sa vie, qui se solde par un avortement… (*Techniquement, c’est une tirade, mais vous pouvez l’adapter en monologue. Vous trouverez un extrait vidéo en VO sous-titrée en anglais, après cette traduction en français.)

Un jour, Karl-Henrik est parti en ville. Je suis allée me promener toute seule à la plage. Une autre fille se trouvait là. Elle était venue d’une autre île pour profiter du soleil de cette plage, qui est plus tranquille. Nous étions là toutes les deux, à bronzer, complètement nues… On s’assoupissait, puis on se réveillait pour remettre un peu de crème solaire… J’étais allongée là… et je regardais le paysage, la mer, le soleil… quand, j’ai aperçu deux silhouettes sur les rochers au-dessus de nous. Deux gamins qui se cachaient et nous regardaient subrepticement. J’ai dit à l’autre fille : « Il y a deux garçons qui nous regarde ». Et Katarina, elle s’appelait comme ça, m’a répondu : « Laisse-les regarder », avant de se mettre sur le dos. Moi, je voulais me redresser et remettre mon maillot, mais je suis restée là, sur le ventre, les fesses à l’air, sans aucune gêne, et dans le plus grand calme. Je regardais Katarina à côté de moi, ses seins, ses grosses cuisses. Elle riait comme une gamine. Pendant ce temps, les garçons s’étaient approchés. Ils étaient plantés là, juste à côté, et ils nous regardaient. J’ai pu voir qu’ils étaient très jeunes. Le plus intrépide est même venu… s’accroupir à droite de Katarina. C’était vraiment très étrange. Et là, Katarina lui a dit : « Dis donc, toi, pourquoi tu ne viens pas plus près ? ». Elle lui a pris la main, elle l’a aidé à retirer son jean et son t-shirt. Et, en un instant, le garçon s’est retrouvé sur elle. Elle l’a guidé à l’intérieur, tout en lui tenant les fesses. Son copain était assis, et il regardait. J’ai entendu Katarina qui susurrait quelques mots à l’oreille du jeune inconnu, puis elle s’est mise à rire. La tête de ce garçon était juste contre la mienne. J’avais le visage rougi et bouffi par la soleil. Et tout d’un coup, je me suis tournée vers lui et je lui ai dit : « Et moi, tu ne viens pas me voir ? » Il s’est retiré et puis… il s’est retrouvé sur moi, en pleine érection. Il m’a attrapé les seins. Ca m’a fait un mal de chien ! Mais j’étais complètement submergée, et j’ai joui presque instantanément. Tu y crois, toi ? Je voulais lui dire de faire attention à ne pas me mettre enceinte… et… je n’ai jamais ressenti ça de toute ma vie… cette décharge de sperme en moi… Il m’a prise par les épaules et s’est penché en arrière. Et j’ai joui, encore et encore. Katarina était toujours là, derrière le garçon, et elle nous regardait. Une fois qu’il a joui lui aussi, elle l’a pris dans ses bras et elle s’est servi de sa main pour se caresser. Et, au moment de l’orgasme, elle a crié comme une Gorgone. Nous avons éclaté de rire tous les trois. Et nous avons appelé l’autre garçon, qui était assis au bas des rochers. Il s’appelait Peter. Katarina a déboutonné son pantalon et a commencé à jouer avec lui. Et quand il était prêt à venir, elle l’a pris dans sa bouche. Lui s’est penché, et l’a embrassé dans le dos. Elle s’est relevée, et elle a attrapé sa tête à deux mains, pour lui offrir sa poitrine. L’autre garçon était tellement excité qu’on a recommencé tous les deux. C’était aussi agréable que la première fois. Ensuite, nous nous sommes baignés, et nous sommes partis chacun de notre côté. Quand je suis arrivée à la maison, Karl-Henrik était déjà rentré. Nous avons dîné, et bu une bouteille de vin rouge… et nous avons fait l’amour. Je n’ai jamais connu un tel plaisir. Ni avant, ni après ce jour-là. Tu arrives à comprendre ça, toi ?

Persona Ingmar Bergman Bibi Andersson Liv Ullmann film

Bibi Andersson (Alma) et Liv Ullmann (Elizabeth Vogler) dans Persona d’Ingmar Bergman (1966).

Et puis, bien sûr, je suis tombée enceinte. Karl-Henrik était étudiant en médecine, et il m’a amenée chez un de ses amis, qui s’est occupé de l’avortement. Ca nous a soulagé tous les deux, car on ne voulait pas d’enfants. Pas à ce moment-là, en tout cas… (Elle se met à pleurer.) C’est complètement absurde ! Tout ça n’a aucun sens ! Toutes ces petites choses qui nous pèsent sur la conscience ! Tu comprends ? Et tout ce qu’on avait décidé de faire, ça ne compte pas ? Ca ne compte plus ? On ne peut pas être quelqu’un, et quelqu’un d’autre à la fois ? Je veux dire, deux personnes en même temps ? (Elle rit à moitié.) Mon dieu, je dis n’importe quoi…! Enfin, ce n’est pas une raison pour pleurnicher comme ça… Je vais chercher un mouchoir… (Elle oscille entre rire et larmes, puis le rire finit par l’emporter.)

Extrait du film Persona d’Ingmar Bergman. Traduction française réalisée par nos soins. N’oubliez pas qu’il est impossible de travailler un texte sans l’œuvre complète.

→ Voir aussi notre liste de textes et de scènes issus du théâtre, du cinéma et de la littérature (pour une audition, pour le travail ou pour le plaisir)

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :