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Claes Bang dans The Square de Ruben Östlund (2017).
The Square commence bien. Écran noir et vibrations d’électro lourdes qui laissent entendre que le thème sera : beaucoup de bruit pour rien. On découvre Christian (Claes Bang), le conservateur du X-Royal Museum de Stockholm, en dépouille de fêtard naufragé sur un canapé. Une assistante vient réveiller le bellâtre dépenaillé pour une interview. Il se passe un peu d’eau sur le visage, une main dans les cheveux, et va s’installer devant une paroi blanche, où l’on peut lire en lettres de néon : « YOU HAVE NOTHING ». Plan large : des piles de gravier sont disposées sous les capitales luminescentes. La journaliste lui demande d’éclaircir une formulation absconse qu’elle a trouvée sur le site du musée, et le curator s’enferre dans une explication du concept de « non-exposition »… Le décor est planté. On est bel et bien dans un espace d’art « moderne et contemporain » !
Seulement, le film de Ruben Östlund s’étire sur 2 heures et 22 minutes comme un bout de caoutchouc. Au lieu de gagner en profondeur, les situations et les personnages frisent l’anecdote, et l’on assiste en fait à une succession de sketches, liés entre eux par une histoire fantoche. Certes, la satire est plaisante, mais rien ne sous-tend les mouvements de caméra. L’atmosphère tourne finalement à la Snow Therapy, et j’ai l’impression d’observer la lente agonie d’une idée.
Il y a des scènes similaires dans La Grande Bellezza (ex : la scène où Jep Gambardella interviewe une « performeuse ») ou dans Nocturnal Animals (ex : l’exposition qui ouvre le film) mais celles-ci trouvent une place dans leur ensemble car la satire de l’art contemporain n’est pas le seul prétexte du film.
Au contraire, The Square n’a pas de toile de fond. C’est l’histoire d’une exposition qui s’organise autour d’un carré de pavés énigmatique (ndlr : l’oeuvre exposée au X-Royal Museum qui donne son nom au film), point. Une oeuvre que Christian décrit lui-même comme « un cadre vide qui attend son contenu ». Et c’est bien dit. Si le réalisateur suédois cherchait la mise en abyme, en effet, l’expérience est réussie. The Square fait languir le spectateur. Cela dit, il aurait pu se contenter de tracer un cadre blanc sur un écran, sans rien projeter dedans… ç’aurait été plus difficile de justifier une palme d’or au Festival de Cannes, bien sûr, mais le résultat aurait fait fureur au Palais de Tokyo !
Bien vu pour la belleza et nocturnal animals !
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