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Hommage à ma grand-mère, qui eut l’audace, à travers la figure d’un vieillard universel, de reprocher au Christ sa jeunesse éternelle. Il est vrai que la Passion oblitère le martyre de nos vieux, condamnés au «naufrage» de la chair et de l’esprit. Cela méritait bien une prière.
« Vous ne fûtes pas vieux en votre humanité.
On sait que vous aviez, de la nature humaine
Tout, hormis le péché. Mais l’homme est limité
En son expérience. Il est donc des domaines
Dont vous savez bien peu en votre humanité :
Le déclin du vieillard, l’avez-vous pressenti ?
Vous êtes mort bien jeune, et de nos déchéances
Vous n’avez rien vécu. Vous n’avez pas senti
Tout se défaire en vous. Car malgré vos souffrances
(Le Linceul de Turin nous le dit) la Passion
A laissé presque intact l’essentiel du visage.
Meurtri, nous le voyons, blessé nous le voyons,
Mais jeune en sa beauté, non abîmé par l’âge…
Vous ne fûtes pas vieux en votre humanité,
C’est le martyre affreux qui vous rendit minable.
Aimez donc s’il vous plaît, d’un amour de pitié
Les vieux à l’esprit lent, à la chair pitoyable.
Parlez-leur en secret. Dites-leur que le Père
Pourrait bien les aimer avec prédilection,
Car voyez-vous, Seigneur, du fond de la misère
Ils vivent ce qui manque à votre humanité. »«Prière du Vieillard» de Marie-Madeleine Martinie.